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SANTÉ & PRÉVOYANCE

INTERVIEW

A. Rollot (ex-Mercer, Humanis) : Comment faire la différence aujourd'hui et demain sur un marché de l'assurance standardisé ?

DSI chez Humanis, de Mercer France et de bien d’autres acteurs de premier plan dans le paysage de l’assurance de personnes ces quarante dernières années, André Rollot appartient à l’équipe de senior advisors d’YCE Partners. En quatre décennies de vie professionnelle, il a été l’un des témoins privilégiés des mutations successives du secteur et l’un des acteurs de sa digitalisation. Gestion, produits et services : il décrypte avec pragmatisme les enjeux majeurs du moment et propose sa vision du futur technologique de l’assurance de personnes.

/Senior advisor : pourquoi et comment ?

Dans quelles circonstances avez-vous rencontré nos consultants ? "J’étais DSI d’un courtier que vous avez accompagné dans la migration de ses systèmes d’information. J’ai rencontré à cette occasion des consultants et consultantes professionnels, informés, avec des idées sur l’assurance de personnes. Nous avons collaboré pendant plusieurs années et je crois pouvoir dire avec du recul que vous avez beaucoup apporté à l’entreprise, et pas seulement dans le strict cadre de la migration mais dans toutes ses ramifications métier et business."Qu’est-ce qui vous a convaincu de nous rejoindre en qualité de senior advisor ? "Pour ce projet de migration il y avait dans votre équipe un senior advisor, DSI retraité. Son expertise technique et son recul ont indéniablement contribué à renforcer vos propositions. Il y a quelques mois, lorsque vous avez fait appel à moi pour redéfinir la stratégie d’un courtier, j’ai accepté sans hésiter de jouer le même rôle."Comment se complète-t-on en mission ? "Dans les grandes lignes : vous pilotez la mission, je vous apporte mon expertise technique, ma vision, et je joue un rôle d’interface entre vous et les équipes techniques de l’entreprise. En résumé je suis là pour conseiller, accompagner et avertir lorsque c’est nécessaire… Mais vous êtes suffisamment compétents pour qu’il n’y ait pas beaucoup d’avertissements à donner !"

/L'enjeu technologique majeur de l'assurance de personnes au présent.

En 40 ans de vie professionnelle, vous avez été le témoin – et l’acteur – de la digitalisation du secteur. Gestion, produits, services : quel est l’enjeu majeur du moment en assurance de personnes, et pourquoi ? "En 2020, l’enjeu majeur reste celui de la satisfaction client. Il existe aujourd’hui un certain discours qui affirme qu’elle s’obtient en proposant de nouveaux services. Toutefois en sondant les clients on s’aperçoit qu’ils attendent avant tout leur assureur sur les fondamentaux : délais de traitement et qualité de l’interlocution. Prenons l’exemple de la téléconsultation, longtemps considérée par les assureurs comme un de ces nouveaux services qui ferait la différence. Maintenant que la téléconsultation explose du fait de la crise, à qui les clients font-ils appel ? À des sites comme Doctolib.Pour se différencier dans un contexte de standardisation des produits, je suis convaincu qu’il faut avant tout mettre en place les outils et processus permettant une présence omnicanale et la centralisation automatisée de l’historique client pour une réponse contextualisée à son besoin, sans discontinuités."Quels sont vos conseils pour être à la hauteur de cet enjeu ?  "Il faut un système d’information performant et évolutif pour rester, sinon en avance, du moins sur un pied d’égalité avec la concurrence. En plus des flux DSN, désormais incontournables, ce système doit intégrer tous les canaux de distribution et d’interlocution (web, mail, téléphone, etc.), pour une gestion automatisée et réactive. Tant que ce premier objectif n’est pas atteint, multiplier les services et produits ne doit pas devenir une priorité."Qu’est-ce qui fait la différence, dans l’assurance, entre une stratégie de digitalisation réussie et un coup d’épée dans l’eau ? "La capacité à faire évoluer ses outils en continu. Il faut comprendre que la technologie et les pratiques évoluent très vite et que rien n’est jamais définitivement acquis. Sans investissements réguliers, le leader d’aujourd’hui ne sera plus le leader de demain. C’est pourquoi il est capital d’étudier en continu les pratiques des clients pour adapter ses canaux de diffusion et d’interlocution en conséquence. C’est précisément parce que l’offre de valeur des pure players comme Alan ou N26 fait exemplairement écho aux pratiques des consommateurs d’aujourd’hui qu’ils ont su s’imposer si rapidement. En résumé, il ne faut jamais considérer le lancement d’un outil comme un aboutissement. Il faut être prêt à tout remettre à plat l’année d’après."

/L'enjeu technologique majeur de l'assurance de personnes au futur.

Quel est le prochain rendez-vous technologique à ne pas manquer, et pourquoi ? "C’est probablement le stockage et l’exploitation des données éparses. Des données de sources et de natures différentes, structurées ou non, réunies pour former ce que l’on appelle un data lake ou lac de données. Associé à des moyens d’analyse en temps réel et d’intelligence artificielle, ce lac de données devrait permettre de rechercher, analyser et corréler l'ensemble des données éparses et hétérogènes de l'entreprise, natives ou acquises (achat/open data), pour saisir des opportunités aujourd’hui indétectables."Comment se préparer à franchir cette nouvelle marche, et quels sont les écueils à éviter ?"Je pense qu’il ne faut pas être trop ambitieux tout de suite mais commencer par des expérimentations ciblées et s’en tenir dans un premier temps à une formule éprouvée : cadrer, tester, acculturer. Identifier un ou deux projets pilotes, par exemple dans l’actuariat ou le conseil aux entreprises, et tester ces nouvelles technologies sur ces périmètres bien circonscrits avec l’appui de data scientists. Si les résultats sont au rendez-vous alors des projets plus ambitieux pourront être lancés."Vous nous connaissez bien. Quelles sont selon vous nos forces pour accompagner ces évolutions ?"Je crois que vous avez tout ce qu’il faut : des têtes bien faites, une ouverture sur le marché et des idées qui continuent à aller de l’avant. Maintenant, comme vos clients, il faut continuer à investir et à se remettre en question, sans temps mort, pour garder toujours une longueur d’avance sur la concurrence et les clients eux-mêmes. Open data, data lake, intelligence artificielle, etc. : tout le monde en parle, mais c’est encore un territoire inexploré pour l’immense majorité des acteurs de l’assurance et du conseil. Pourtant les données sont là : elles dorment dans d’innombrables bases, muettes parce qu’inexploitées faute de temps et de compétences adaptées. Pour faire la différence demain sur un marché de l’assurance standardisé, il faudra pouvoir rechercher, corréler et analyser ces données éparses, qu’elles soient structurées ou non. Et je crois que vous êtes précisément en train de prendre ce virage capital avec la création de votre filiale YCE D."

Lucas Schneider, 23.03.2021

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Crédit photo :Dennis Kummer sur Unsplash

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